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Rémi Meunier a vaincu le Piékouagami à 15 ans

Yohann Harvey Simard
Le 13 août 2021 — Modifié à 15 h 51 min le 13 août 2021
Par Yohann Harvey Simard - Journaliste de l'Initiative de journalisme local

Le nom de Rémi Meunier a marqué l’imaginaire de plusieurs. Il a été le premier Robervalois à traverser à la nage le mythique lac Saint-Jean. Un exploit qu’il a réalisé à seulement 15 ans, le 12 août 1978.

Retour sur cette journée euphorique dont se souvient très clairement le principal intéressé. Une histoire un peu folle qui a bien tourné.

« J’étais insouciant d’une certaine manière. Je ne me rendais pas compte à l’époque que je m’attaquais à un mythe. Les gens voyaient les nageurs qui traversaient le lac comme des héros, des surhumains et là un jeune de Roberval s’attaquait au lac Saint-Jean. C’était l’euphorie quand je suis arrivée dans la rade! C’était comme un rêve», lance l’homme de 58 ans qui vit à Sherbrooke.

Évidemment, les gens lui parlent encore de cet exploit hors du commun réalisé à un si jeune âge. Il faut avoir nagé le moindrement pour savoir que parcourir 32 km à 15 ans est presque impensable, vu la condition physique nécessaire et la maturité musculaire.

Et à ce jour, il serait toujours le plus jeune à avoir réalisé la Traversée.

Rémi Meunier aime beaucoup cette photo où l’on voit son guide Marcel Larouche et son père Richard juste avant de sortir de l’eau à 20h15, le 12 août 1978,

Genèse de ce parcours

Rémi Meunier, dès son jeune âge, aime s’amuser dans l’eau. Il prend goût à la nage et souhaite participer aux épreuves de courtes distances de la Traversée, mais il est trop jeune. À 14 ans, il nage en compagnie de Christian Boily dans la piscine familiale.

« C’était un bon nageur et il cherchait une place pour s’entraîner pour le 10 km entre Chambord et Roberval. J’ai nagé avec lui et j’ai décidé de m’inscrire à cette épreuve. »

Rémi nageait un peu dans le lac Saint-Jean, mais n’avait pas encore fait de très longues distances. Il prend donc le départ. Les conditions ne sont pas faciles, il trouve qu’il n’avance pas trop, combat plusieurs crampes, mais termine l’épreuve en 4 heures 32 minutes.

Résultat : il a la piqûre de la nage en eau libre.

« Je me suis dit que j’étais capable et j’ai commencé à visualiser que je pourrais un jour traverser le lac Saint-Jean »

Idée de fou

L’année suivante, il s’entraine pour la « mini traversée ». Il rencontre des conditions épouvantables qui le forcent à nager pendant 7h30 pour parcourir 10 km.

« En nageant aussi longtemps, je me suis vu en train de traverser le lac et de toucher à la plaque.  J’ai dit à mon père que j’aimerais ça l’essayer de traverser le lac! Il n’a rien dit… »

En bon père de famille, son père Richard n’a pas voulu lui dire le fond de sa pensée. « Après qu’il ait fait la mini traversée, j’ai rencontré John Kinsella (champion de la Traversée) qui m’a dit que ce petit gars-là serait capable de traverser le lac.  J’en ai parlé avec un de mes frères qui assurait la sécurité à la Traversée. On s’est dit, au pire il va débarquer comme plusieurs qui n’ont pas réussi. Au moins, il l’aura essayé.  Mais au fond de moi, je savais qu’il réussirait! »

Richard Meunier était fier de son fils, car au fond de lui, il savait que Rémi réussirait son projet un peu fou de traverser le lac à 15 ans.

13 heures 53 minutes

C’est le temps qu’a réalisé Rémi Meunier pour traverser le lac Saint-Jean. Des heures de souffrances qui ont culminé par un moment de frénésie qui a marqué sa vie à jamais.

« Cette Traversée a permis de former l’homme et le père que je suis aujourd’hui. C’est un accomplissement qui m’accompagne depuis ce temps. »

Rémi Meunier met la main sur la plaque après 13 heures et 53 minutes de nage.

C’est que Rémi Meunier n’avait pas la préparation physique pour s’attaquer au lac Saint-Jean. « Dans ma tête, je me voyais nager dans le lac, je m’imaginais les difficultés, les douleurs et puis j’arrêtais. Jusqu’au jour où je me suis vraiment vu toucher à la plaque et imaginer les gens au quai.  C’est cette préparation mentale qui m’a permis de finir. »

Le matin du départ à Péribonka, il se fait réveiller en retard. Il mange un macaroni en vitesse avant de sauter à l’eau à 6h15. Le temps est glacial à l’extérieur et la température de l’eau est à 62 Fahrenheit. Tout se passe bien dans les premiers kilomètres puis l’envie d’uriner le tenaille.  Il a beau tout faire, il ne réussit pas.

« J’arrête, je ne sais combien de fois, je me mettais en boule pour me réchauffer je n’y arrivais pas. J’avais imaginé toutes les difficultés sauf un problème pour uriner. La douleur était intenable et j’ai fini par réussir. »

Puis plus tard, c’est une douleur sournoise qui s’installe dans son épaule gauche.  Il compose avec la douleur et poursuit.

Épuisé, c’est quand il arrive dans la rade qu’il voit tout le monde massé sur le quai, les nombreuses embarcations qui l’accompagnent qu’il se rend compte de ce qu’il est en train d’accomplir.

« Il y a plein de gens qui ont sauté à l’eau pour nager avec moi dont mon guide, Marcel Larouche qui a qui guidé les meilleurs de la Traversée et qui n’a jamais sauté à l’eau pour un nageur. C’est quand j’ai touché à la plaque et vu toute la foule qui criait que j’ai senti l’incroyable euphorie! ».

Rémi Meunier ne pensait pas que son exploit marquerait tant les esprits des Robervalois.

Reconnaissance

Rémi Meunier est très reconnaissant envers la ville de Roberval qui a nommé une rue à son nom. Il est surtout fier que Roger Boutin ait nommé son restaurant de la marina 1353 en l’honneur du temps de sa traversée.

« Je me rends compte aujourd’hui comment cette journée a marqué plusieurs personnes. Moi j’ai vécu comme un rêve la frénésie après mon arrivée. Mais combien de gens m’ont témoigné qu’ils étaient présents et qu’ils avaient vécu quelque chose d’incroyable alors que moi, je me disais que j’étais un sportif qui avait simplement réalisé son défi. »

Roger Boutin, Rémi Meunier, Tony Girard, Carl Murray et Sabin Côté lors du dévoilement de la mosaïque que l’on retrouve au restaurant 1353 de la marina de Roberval.

Rémi Meunier a poursuivi sur cette lancée et a participé à différentes épreuves, mais une blessure qu’il trainait depuis des années l’a contraint à arrêter à l’âge de 19 ans.

Plus dur au monde

Rémi Meunier croit toujours que le lac Saint-Jean représente la compétition de nage la plus difficile au monde. Il estime que la direction devrait miser sur cet aspect dans le futur pour assurer la pérennité de l’événement.

« Si tu veux te prétendre meilleur nageur au monde, il faut que tu gagnes la Traversée. Le lac Saint-Jean est redoutable et c’est ça qu’il faut vendre. Il faudrait peut-être que la direction quitte la FINA et ne permette pas le port du wetsuit qui dénature la nage en eau libre. »

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