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L’évêque du diocèse de Chicoutimi raconte son parcours

« Le Chili et les prisons ont développé ma sensibilité pour une justice sociale », affirme Mgr René Guay

Jean-François Desbiens
Le 12 janvier 2024 — Modifié à 10 h 48 min le 12 janvier 2024
Par Jean-François Desbiens - Journaliste

Nous vous proposons à nouveau un entretien avec une personnalité de la région, dans le but d’aller un peu plus loin sur ce qu’on connaît de cette personne. Cette semaine, l’évêque du diocèse de Chicoutimi, Mgr René Guay, a accepté de répondre à nos questions.

Vous avez 73 ans, vous dirigez le diocèse depuis février 2018 et vous êtes venus au monde à Saint-Thomas-Didyme. Quelle enfance avez-vous eu?

Mes parents, Magella Tremblay et Gérard Guay, ont eu 11 enfants, mais trois sont décédés en bas âge. On était donc finalement 8, soit 5 filles et 3 garçons. J’ai eu une enfance heureuse, en plein centre du village, près de la patinoire. J’ai joué au ballon-ballet, j’ai patiné beaucoup et joué un peu au hockey. Quand j’étais jeune, on avait un magasin général. Sur l’heure du midi en semaine, on allait garder le magasin pour permettre aux parents d’aller dîner. C’est là que j’ai commencé à lire les journaux. Quand j’étais jeune, vers 5 ou 6 ans, je jouais à la messe. Je me souviens d’avoir béni le mariage de mes sœurs. Des fois, j’étais le célébrant et le futur marié en même temps, avec une petite amie. Je changeais de bord selon le moment de la cérémonie.

Vous êtes ensuite entré au petit séminaire puis au cégep de Chicoutimi en sciences humaines, avant de choisir de faire un baccalauréat en théologie pour devenir prêtre en 1975. Comment s’est manifesté l’appel de Dieu?

Je sentais qu’il y avait quelque chose qui ne me lâchait pas depuis mon très jeune âge. Même si je projetais d’autres choses, ça revenait. Je me disais que ce serait un temps de discernement, pour voir clair et mieux me connaître. Je me disais qu’ils vont me le dire si ça n’a pas d’allure, eux, que je devienne prêtre et ils ne l’ont pas fait. J’ai ensuite reçu une lettre me disant que j’avais une bourse pour la maîtrise. Je suis allé la faire à l’université Laval.

Vous avez aussi été missionnaire au Chili durant 13 ans, à l’époque du dictateur Augusto Pinochet, dans l’archidiocèse de Santiago et dans le diocèse de San Bernardo, après avoir appris la langue au Guatemala. Comment ça s’est passé?

Je suis arrivé au Chili environ 6 ans après le coup d’État militaire. Les gens commençaient à lever la tête un peu, mais ils avaient encore peur. Il y avait eu de la répression, les violences et les disparitions. Il y en avait encore durant mon séjour, y compris des massacres. Les organisations politiques et sociales avaient été décapitées lors du coup d‘État. L’église était tolérée, mais il ne fallait pas faire de politique. On travaillait quand même dans la défense des droits humains. De manière assez discrète parce que c’était illégal. Mais il fallait le faire pour sauver des vies et aider des parents qui cherchaient leurs enfants enlevés par la dictature. On entreprenait des démarches. D’autres fois, on allait cogner aux portes des prisons pour demander si une personne était là.

Une autre facette méconnue de vous, c’est que vous êtes depuis longtemps aumônier dans les prisons. Vous l’avez été à Québec, Chicoutimi et Roberval dernièrement.

Oui, j’ai été aumônier à la prison de Chicoutimi durant une vingtaine d’années. Ce n’était pas à plein temps, j’y allais sur appel, quand il y avait des urgences et tous les jeudis soir avec des laïques. On se répartissait les secteurs. J’y allais aussi le samedi ou le dimanche durant l’après-midi et la soirée. J’allais voir tous les gars et il y avait une messe. Je n’ai jamais manqué de monde! Dernièrement, j’ai aussi passé toute une journée à la prison de Roberval. Je suis arrivé à 8h30 et je suis parti à 16h15. J’ai rencontré tous les détenus. On leur a distribué des cartes faites par des bénévoles avec des bonbons. Je pense que le Chili et les prisons, ça change son homme. Ça m’a formé. Ça a développé ma sensibilité pour une justice sociale.

En terminant, qu’est-ce qu’on ne sait pas déjà de vous qu’on serait surpris d’apprendre?

J’aime beaucoup faire la cuisine. Je fais mon épicerie moi-même et je regarde les spéciaux. L’image de l’évêque avec une cuisinière et un chauffeur, c’est faux. Quand je me déplace, on me demande parfois si je suis venu avec mon chauffeur. Je réponds que j’ai juste une chaufferette dans mon auto!

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