Chroniques

Temps de lecture : 2 min 40 s

Pour un meilleur enseignement de l’économie

Le 23 octobre 2025 — Modifié à 06 h 11 min le 23 octobre 2025
Par Roger Lemay

Je passe beaucoup de temps — beaucoup trop — sur l’application TikTok. Si vous ne l’avez pas encore sur votre téléphone, laissez-moi vous donner un bon conseil : évitez de la télécharger. C’est comme un sac de chips que vous ouvrez en pensant n’en manger que la moitié. Au bout d’un moment, vous constatez que vous êtes passé à travers. Avec TikTok, vous ouvrez l’appli et vous remarquez que ça vous a bouffé une demi-heure… voire l’heure au complet.

Bien entendu, il n’y a pas que des futilités. Même que, pour obtenir les dernières nouvelles, vidéos à l’appui, c’est très rapide. Tous les médias produisent maintenant du contenu pour TikTok. Et, bien entendu, les clips proposés le sont en fonction de nos goûts et de nos intérêts. Les algorithmes de TikTok (et de Reels sur Facebook) tissent silencieusement une mosaïque de vidéos, guidés par nos recherches personnelles, pour nous présenter exactement ce qui captera notre regard.

Or, étant donné mon intérêt prononcé pour l’économie (pour moi, Gérald Fillion et Pierre-Yves McSween sont des rock stars), tous les clips en rapport avec les budgets, les finances personnelles, l’immobilier, me passent sous les yeux. Je connais bien les principaux influenceurs financiers à l’assaut des réseaux sociaux, surtout les jeunes en vogue, comme Pierre-Charles Jolicoeur — le fameux PC — un courtier hypothécaire qui y étale ses expériences rocambolesques. Je me dis que si un jeune comme lui peut intéresser les générations Y et Z aux affaires, eh bien, let’s go !

Car en regard de la situation actuelle de l’épargne au pays et dans la province, mon constat est le suivant : les Québécois, de manière générale, sont des illettrés en finances. Pas étonnant, quand on pense que parler d’argent pendant un souper est encore tabou. La majorité des élèves québécois quittent le secondaire sans comprendre le fonctionnement des impôts, du crédit, de l’épargne, des taux d’intérêt et du budget. Rendus à l’âge adulte, nos jeunes deviennent vulnérables aux dettes coûteuses qui se répercuteront leur vie durant. Allez consulter le site de Statistique Canada. Les données sur le faible taux d’épargne des ménages et leur haut taux d’endettement donnent la nausée.

Je suis un dinosaure. J’achète mes voitures comptant, et jamais neuves, dès que j’ai suffisamment d’argent. Et, aussitôt, je commence à mettre de côté chaque mois une somme pour la prochaine voiture, que je paierai aussi cash, dans six ou sept ans. Je tiens ça de mon père. Et je n’en reviens pas qu’on ait réussi à vendre aux gens l’idée que l’endettement systémique crée une position financière enviable. En clair : l’utilisation régulière de votre carte de crédit va vous forger une cote de crédit supérieure à la mienne, parce que j’utilise, la plupart du temps, ma carte de débit. Conclusion : votre cote, basée sur votre historique de crédit, est plus avantageuse que la mienne aux yeux d’une institution financière… simplement parce que je paie comptant.

Vous trouvez ça logique ?

Pour en revenir à l’éducation : j’ai vu passer, il y a quelques jours, une publication de Luc Poirier résumant qu’il faudrait peut-être enseigner davantage l’économie à nos jeunes, plutôt que de la grammaire. Bien sûr, cela a suscité la polémique. Mais je ne suis pas sûr qu’il ait eu tort. La santé financière d’une personne ou d’un ménage passe d’abord par l’éducation et la connaissance. Comprendre dès le départ les avantages de l’épargne et de l’intérêt composé conduit inévitablement, un jour, à la liberté financière — et donc, à la paix de l’esprit. Selon un sondage Léger, 86 % des personnes interrogées ont affirmé ressentir un stress financier, et, de ce nombre, 44 % sont en proie à une anxiété modérée à extrême. Vous ne croyez pas qu’on est rendus à effectuer un «reset» complet de notre approche en matière d’éducation financière au Québec… et ce, bien avant de parler d’indépendance ?

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